L'insolite de l'art chrétien : églises de Champagne-Ardenne

L'insolite de l'art chrétien : églises de Champagne-Ardenne

BRIEULLES-SUR-BAR : dans les pas de Murillo

Chef de file du siècle d'or de la peinture espagnole

Bartolomé Estéban Murillo est né en décembre 1617 à Séville (Espagne). Orphelin à l'âge de 10 ans, ce petit dernier d'une famille de 14 enfants montre très tôt des dons pour le dessin. A 15 ans son tuteur le place en apprentissage pour l'initier à l'art de la peinture.

En 1645 le tableau de La Vierge au Rosaire inaugure une brillante carrière qui conduira Murillo à devenir «le meilleur peintre de la ville». En 1669, il fonde l'Académie des Beaux Arts de la ville de Séville et en devient président. Il en démissionnera toutefois assez vite (1671) pour se consacrer uniquement à la décoration de l'église de l'hôpital de la Caritad où il y réalise onze compositions. L'École de Séville devient à cette époque la plus importante école de peinture espagnole du XVIIe siècle, avec à sa tête Bartolomé Murillo.

 En 1682, alors qu'il peint "Le Mariage de Sainte Catherine" pour le couvent des capucins de Cadix, il chute de l'échafaudage et décède peu de temps après. Il était alors au sommet de sa gloire.

Ses sujets de prédilection sont des scènes religieuses. Ses "Madones" en particulier lui assurent un immense succès. Son épouse Béatrice lui sert de modèle pour peindre ses personnages féminins. Ils dégagent tous une impression de calme, de pureté, leurs longs cheveux et la profondeur de leur regard forcent l'admiration et ébranlent les sensibilités.

L'Immaculée Conception réalisée en 1668 pour la cathédrale de Séville est du nombre.

 

L'Immaculée Conception des Vénérables

Immaculée conception murillo madrid.jpg

 

 Justino de Neve, chanoine de la cathédrale et aussi directeur ecclésiastique de l'hôpital des Vénérables Prêtres de Séville, commande ce tableau à Murillo. Dès l'œuvre achevée la toile décore l'autel de l'église de l'hôpital ; elle devient rapidement célèbre et les connaisseurs d'art viennent l'admirer de toute l'Andalousie.

Au début du XIXe siècle, l'empereur Napoléon 1er conduit ses offensives militaires dans l'Europe. Un personnage joue un grand rôle dans le succès de ses batailles. Jean de Dieu Soult, orphelin très jeune lui aussi, est doué pour les affaires militaires. Il s'engage dans l'armée napoléonienne et gravit rapidement les échelons et accumule les galons. En 1804, l'empereur le nomme maréchal d'Empire, cinq ans plus tard, le maréchal Soult devient le major général des armées françaises. En 1810, aux commandes de l'armée en guerre contre l'Espagne, il entre et occupe Séville. A cette date et pendant deux ans, sur ordre du maréchal, l'armée française entame un pillage systématique des biens de l'Église et du patrimoine artistique de la ville. Le tableau de l'Immaculée Conception des Vénérables est emporté et ramené en France. Près de mille tableaux sont ainsi spoliés. Parmi eux, une partie ira enrichir les collections du Louvre. C'est le cas de l'Immaculée Conception qui est acquise par le musée parisien en 1852, elle y demeurera jusqu'en 1941.

A partir de cette date, le célèbre tableau regagne sa patrie d'origine et en 2007, le département Restauration du musée National de Madrid lui rend l'éclat de sa splendeur primitive.

Le thème choisi en 1678 par le commanditaire du tableau faisait suite aux préconisations du Concile de Trente réaffirmant avec vigueur les prémices du dogme de l'Immaculée Conception promulgué en 1854. Les représentations mariales se multiplièrent alors dans toute l'Europe. De nombreuses églises françaises et ardennaises du XVIIIe au XIXe siècles encouragent la dévotion en faveur de Marie Immaculée ; des confréries s'établissent en son honneur, des autels reçoivent sa dédicace et l'art contribue à sa vénération. Le tableau de Murillo, une des plus belles réalisations baroques, devient, depuis Le Louvre, un modèle incontournable que les copistes s'empressent d'imiter. 

Le tableau qui orne le retable du maître-autel de l'église Notre-Dame de Brieulles-sur-Bar trouve là peut-être son origine.

Le tableau de Brieulles

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Bien que défraîchie, la composition de Brieulles-sur-Bar offre une lecture identique à celle de l'originale.

L'expression de la pureté préservée de Marie s'affiche dans le blanc de la tunique, alors que le bleu du manteau renvoie à l'éternité, destination ultime qu'elle rejoindra à l'issue de son Couronnement, devenant ainsi la reine des Cieux. La Vierge apparait sous les traits d'une jeune femme ; sa beauté, l'éclat de son visage apaisé, attirent les regards des angelots. La scène n'est pas statique. La disposition des chérubins, regroupés aux pieds de Marie, contribue à renforcer le mouvement d'ascension que suggèrent encore la nuée flottante et la clarté de l'aurore naissante, présage d'un jour nouveau. L'auréole lumineuse qui baigne, en arrière plan, le visage de Marie, avec ses yeux levés vers l'éternité dans un regard de confiance, donnent à la scène une atmosphère de forte religiosité.

Le tableau s'intègre ici parfaitement dans un environnement baroque avec son autel et ses colonnes corinthiennes de marbre, ses entablements, frontons et pots dégoulinant de guirlandes florales, tous, typiques du XVIIIe siècle. La forme de l'encadrement de la toile avec sa partie sommitale en arc cintré ajoute de l'élégance à la composition, contribue aussi au mouvement d'élévation par sa partie effilée au sommet, elle participe enfin à la symbolique puisque le demi cercle (ou la coupole pour les volumes) évoque le Ciel de l'Au-delà.

A l'exemple de Brieulles-sur-Bar, beaucoup d'églises possèdent des copies du célèbre tableau de Murillo. Une lecture rapide du site des M.H. sur la base Palissy/Mérimée recense quelques sites dans les églises de:

- Sainte Valérie du Moutier à Felletin (Creuse) auteur : Chasselat Jean Henri Saint-Ange, peintre

- Saint-Martin à Saint-Martin-le-Vieux (Haute-Vienne)

- Saint-Martin à Estibeaux (Landes)

- Saint-Martin à Momuy (Landes) vitrail du verrier Emmanuel Marie-Josèphe Champigneulle

- Saint-Pierre-aux-Liens à Jourgnac (Haute-Vienne)

- Saint-Saturnin à Nonaville (Charente)

- Saint-Pierre à Saint-Pierre d'Oléron (Charentes Maritimes)

- Saint-Rémi à Mareuil-en-Brie (Marne)

- Notre-Dame de Marquigny (Ardennes)

Immaculée Conception Mareuil en Brie.jpg

 

Le tableau de l'église de Mareuil-en-Brie (Marne) photo base Palissy/ Mérimée des M.H.

La délégation régionale Champagne-Ardenne de la Fondation du Patrimoine, la commune de Mareuil-en-Brie lancent une souscription pour la rénovation du tableau

Il est à espérer qu'un jour la même démarche soit menée en faveur de celui de Brieulles-sur-Bar.

JLC 

 

 PS: En réponse à ma demande une paroissienne de Mareuil-en-Brie précise que la rénovation du tableau de l'église n'est pas encore programmée. La toile a été retirée des boiseries en 2012 lors de travaux de restauration intérieure. Cette personne a eu la gentillesse de joindre quelques photos à son courrier, je l'en remercie vivement et en présente quelques-unes ci-après :

 

Mareuil 1.jpeg

 

Mareuil 4.jpeg

 

Mareuil 3.jpeg

Le tableau de l'Immaculée Conception de Mareuil-en-Brie

Tourteron à Marqueny 155 réd.jpg

 

Le tableau dans l'église Notre-Dame de Marquigny (Ardennes)



28/05/2014
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